Vosges - Coupes budgétaires dans la culture : des répercussions probables pour tous ?
- actuvosges88
- 14 févr.
- 4 min de lecture
Le ministère de la Culture doit une nouvelle fois faire face à une réduction drastique de son budget. Après une première coupe de 100 millions d’euros en décembre dernier, c’est une nouvelle réduction de 50 millions qui a été annoncée pour 2025. Une décision qui soulève de nombreuses inquiétudes parmi les acteurs du secteur culturel, notamment dans le domaine du spectacle vivant, déjà fragilisé par les crises successives.

Ben Boisgontier, un conteur emblématique de Bretagne est lui aussi inquiet de cette situation
Une remise en cause du service public culturel
Si le budget global du ministère de la Culture reste à 4,45 milliards d’euros, en hausse de 30 % depuis 2017, il ne suffit plus à répondre aux besoins croissants du secteur, notamment face à l’augmentation des coûts de production et de diffusion. Pour Emmanuel Wallon, professeur de sociologie politique à l’université Paris-Nanterre, cette nouvelle coupe s’inscrit dans une tendance inquiétante :
« La culture est remise en question au même titre que d'autres politiques publiques pour la jeunesse et l'éducation populaire. L’inflation et l’augmentation structurelle des coûts rendent ces coupes budgétaires d’autant plus problématiques, menaçant directement la production et la diffusion du spectacle vivant. »

La Souris Verte d’Épinal se bat au quotidien pour offrir de la diversité culturelle
Le Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (SYNDEAC) estime déjà que 1 500 emplois sont menacés par ces restrictions budgétaires. Joris Mathieu, co-président du SYNDEAC et directeur du Théâtre Nouvelle Génération à Lyon, met en garde contre l’incapacité des institutions culturelles à remplir leurs missions publiques dans ce contexte :
« Aujourd’hui, les institutions n’ont plus aucune marge d’adaptation. Ces coupes risquent de condamner des lieux culturels à la fermeture, car les financements publics ne suivent plus. Nous nous retrouvons à devoir choisir entre supprimer des emplois ou réduire drastiquement l’offre culturelle. »
Des conséquences désastreuses pour le spectacle vivant
Le spectacle vivant est particulièrement vulnérable à ces réductions budgétaires. En effet, ce secteur repose en grande partie sur les subventions publiques pour assurer la rémunération des artistes, la création et la diffusion des œuvres. Avec la baisse continue des financements, de nombreux théâtres, festivals et compagnies se retrouvent en grande difficulté.
La situation est d’autant plus alarmante que certaines collectivités locales, elles aussi en proie à des restrictions budgétaires, ont déjà diminué leurs aides à la culture. En Pays de la Loire, la présidente de région Christelle Morançais a récemment coupé 82 millions d’euros dans les dépenses de fonctionnement, ciblant notamment la culture. Un choix politique qui lui a valu le surnom de « Javier Milei du Grand Ouest ».

Les spectacles gratuits font toujours le plein de spectateurs...
En parallèle, le département de l’Hérault a purement et simplement supprimé toutes les subventions culturelles, une décision prise par Kléber Mesquida, président PS du Conseil départemental. L’Opéra de Toulon, quant à lui, a licencié du jour au lendemain la totalité de son chœur fixe, soit 21 artistes. Ces décisions, qui frappent au cœur la culture et ses travailleurs, sont perçues comme un véritable massacre culturel en marche.
Un fonds "exceptionnel" pour tenter de limiter la casse...
Face à la fronde du secteur, la ministre de la Culture, Rachida Dati, a annoncé la mise en place d’un fonds exceptionnel de 25 millions d’euros, porté à 40 millions d’euros par le Sénat, pour soutenir les structures les plus en difficulté. Ce fonds vise notamment à préserver des institutions emblématiques comme le Festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence.
Toutefois, cette mesure est jugée largement insuffisante par les syndicats et les professionnels du spectacle vivant. Une quinzaine d’organisations, dont la CGT Spectacle, le SYNDEAC et le Syndicat des musiques actuelles (SMA), ont interpellé la ministre dans une lettre ouverte, dénonçant une atteinte sans précédent au service public de la culture.
De plus, les propos récents de Rachida Dati sur son ambition de « culture dans les campings » ont suscité un tollé parmi les professionnels du secteur. Alors que les théâtres, opéras et festivals sont en péril, l’idée de transformer l’art en simple animation estivale pour vacanciers est perçue comme une réduction drastique de la mission culturelle de l’État.

Il y a peu, Jérémy Frérot a enflammé la Souris Verte
Une mobilisation nécessaire pour sauver la création
Alors que la commission mixte paritaire sur le projet de budget 2025 doit se réunir prochainement, les acteurs du spectacle vivant continuent de se mobiliser pour tenter d’infléchir ces décisions.
Emmanuel Paysan, directeur de La Souris Verte à Épinal, a exprimé son inquiétude face à cette situation :
« À l'heure où le ciel s'assombrit un peu partout dans le monde, notre État envisage de tailler dans notre lumière, la culture. Est-ce vraiment le moment de nous plonger dans la nuit noire quand autant de virages sont à prendre pour l'humanité et notre planète ? »
Malgré les promesses de Rachida Dati d’utiliser des crédits de réserve pour compenser les coupes, les professionnels du spectacle vivant restent sceptiques. Ils craignent que ces ajustements ne soient que des mesures temporaires et insuffisantes pour préserver la diversité culturelle et artistique en France.

Une image qui résume tout...
Pourquoi ce massacre est une catastrophe ?
Détruire la culture, c’est tuer l’émancipation.
La culture, ce n’est pas un loisir. C’est un outil de transmission, de pensée critique et d’éducation. Réduire son financement, c’est encourager l’ignorance et affaiblir le libre arbitre des citoyens.
Un pays sans culture, c’est un pays sans âme
Que restera-t-il de la France et des autres pays si nous laissons mourir leur patrimoine, leur création, leur savoir-faire artistique ? Un pays sans culture est un pays qui renonce à sa propre histoire.
La culture, ce n’est pas une dépense, c’est un investissement
Chaque euro investi dans la culture génère de la richesse. La culture, c’est des emplois, du tourisme, de l’attractivité économique. Détruire la culture, c’est un choix idéologique absurde qui appauvrit la nation.
Alors, on laisse faire ?
Trop longtemps, la culture a été vue comme un secteur « non essentiel ». Pourtant, dans chaque crise, c’est la culture qui permet à une société de tenir debout.
Le combat pour la culture est un combat pour la démocratie.Parce qu’une société sans culture est une société qui meurt.
Rédaction : Alain Reynders
Photo : Even'Art pour la couverture
Alain Reynders pour les autres
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